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19 décembre 2023

Le Noël pas comme les autres d'Agatha Christie


Agatha Christie a disparu durant 11 jours au début du mois de décembre 1926. Pour la romancière et sa fille Rosalind âgée de 7 ans, la fête de Nöel de cette année-là allait assurément être différente des autres.

Le mari d'Agatha Christie voulant divorcer et partir vivre avec sa maîtresse Nancy Neele, Agatha et lui s'étaient querellés le vendredi 3 décembre 1926 au matin. Le soir même la romancière avait disparu au volant de sa Morris Cowley. S'ensuivit l'un des mystères les plus rocambolesques du XXe Siècle.

Dès mars 1924, Agatha Christie publie au Royaume-Uni une nouvelle policière et fantastique où figurent pour la première fois les personnages intrigants de Monsieur Satterthwaite et d'Harley Quinn : L'Arrivée de Mr Quinn. Monsieur Satterthwaite, un homme dans la petite soixantaine, fait montre d'une apparente discrétion en société pendant qu'il observe ses congénères avec la plus grande attention. Confronté à des énigmes et des meurtres, il est aidé grâce à l'apparition soudaine et parfois irréelle d'un autre personnage, Harley Quinn. En éclairant les faits sous un jour nouveau, Quinn lui permet de résoudre les énigmes.

Le samedi 4 décembre 1926 est publié aux Etats-Unis La Voix dans les ténèbres, septième nouvelle policière et fantastique avec les deux personnages. Avant cela, tôt le matin, dans le sud de l'Angleterre, le jour va bientôt se lever sur les vallons du Surrey quand un vacher, se rendant sur son lieu de travail, repère près de Newlands Corner une voiture abandonnée dont les phares éclairent encore l'obscurité. Vers 8h du matin, en promenant son chien, un jeune gitan venu d'un camp situé à proximité aperçoit lui aussi les lumières de l'automobile. Il s'approche et remarque que l'avant est enfoncé dans un buisson.

Dans le même temps, à la manière de Monsieur Quinn, surgit un certain Frederick Dore, testeur de voitures dans la petite cinquantaine et travaillant pour une marque dont le hasard fait qu'elle porte les initiales d'Agatha Christie, AC. L'homme prend tout en mains. Il fait l'inventaire de ce que la voiture contient et, après avoir vu le véhicule, il est même probable qu'il passe une vitesse pour sécuriser l'automobile. Frederick Dore confie la responsabilité de la Morris Cowley au patron du kiosque à café situé en haut de la colline et se rend ensuite au Newlands Corner Hotel proche pour appeler la police.

En ce début décembre 1926, le Newlands Corner Hotel est ouvert depuis quelques mois seulement. A cet endroit se trouve la plus belle vue d'Angleterre. Toute cette campagne vallonnée partant de Newlands Corner, descendant vers Albury et allant jusqu'à Shere, au cœur de laquelle se trouve l'étang Silent Pool, est empreinte de mystère et de fantastique.

***

Le samedi 4 décembre après-midi, tandis qu'à Albury les recherches de la disparue s'organisent autour de la carrière de craie, la voiture d'Agatha Christie est amenée dans le garage de Guilford. Sa propriétaire se trouve alors dans le train de Londres vers Harrogate, une ville situé dans le nord du Yorkshire. Peu avant 19h, elle arrive en taxi dans un hôtel-SPA où elle demande, sous le nom de la maîtresse de son mari, une chambre en pension complète. Elle indique que ses bagages suivront et s'achètera plus tard quelques vêtements au village. Durant les quelques jours qu'elle passera sur place, Agatha Christie joue au billard (plutôt mal) chante (plutôt bien) et danse. Elle avait pris son dernier cours de danse en compagnie de sa secrétaire Charlotte Fisher (Carlo), le soir du 2 décembre. Elle lit aussi beaucoup.

La nouvelle de sa disparition s'étant répandue dans toute l'Angleterre, Agatha Christie finit par être progressivement reconnue et le mardi 14 décembre, onze jours après qu'elle ait quitté Styles, la police d'Harrogate est prévenue. Le lendemain, le colonel Christie se rend sur les lieux en train. Il arrive à l'hôtel et reconnaît sa femme. Il est suivi par la sœur ainée d'Agatha et son mari J. Watts et tous trois emmèneront peu après la romancière chez les Watts à Abney Hall, dans la ville de Manchester.

Après la mort de son père, Agatha Christie et sa mère avaient passé chaque année les fêtes de Noël à Abney Hall, et elle connaissait bien la grande demeure victorienne et son parc. En compagnie de la famille de son beau-frère elle avait vécu là de superbes Noëls. Abney Hall avait tout pour plaire et la féérie de l'endroit avec un jardin doté d'une cascade, un ruisseau et un tunnel sous l'allée permettaient tous les rêves d'enfant. Le repas de Noël et les présents placés dans un bas constituaient pour elle de précieux souvenirs. Plus âgée, elle s'y rendait d'ailleurs souvent. Cependant, en décembre 1926, la maman d'Agatha Christie est décédée depuis le 5 avril.

Le jeudi 16 décembre la romancière, toujours sous le coup d'une apparente perte de mémoire, est visitée par deux médecins locaux. Le mercredi suivant 22 décembre, trois jours avant Noël, Archibald Christie amène à Abney Hall leur fille Rosalind, âgée de 7 ans afin que la famille soit réunie et, incroyable, Agatha dit ne pas se souvenir des moments que mère et fille ont passé ensemble à Styles !

Il n'existe pas d'indication connue du public sur le déroulement du Nöel 1926 à Abney Hall, ni sur la durée exacte du séjour sur place d'Agatha Christie. Depuis le 16 décembre, il est probable que les Watts ont eu la possibilité d'organiser pour le 25 une belle fête de Nöel dans la tradition familiale. Ce que l'on sait est qu'à une date inconnue Agatha Christie a quitté Abney Hall pour Londres avec sa fille Rosalind et sa gouvernante et secrétaire Charlotte Fisher, afin de faire soigner son amnésie à Harley Street. Or, les dates du jeudi 23, vendredi 24 et surtout samedi 25 décembre 1926 rendent peu envisageable un déplacement sur Londres ces jours-là. D'autant que beaucoup doutent de la vraisemblance de son amnésie et que, près d'un Siècle plus tard elle est toujours discutée !

En tout état de cause, Agatha Christie publiera la suite de sa série dans laquelle apparaissent les personnages de Monsieur Satterthwaite et d'Harley Quinn au cours du premier semestre 1927. La Beauté d'Hélène en avril et Le Sentier d'Harlequin en mai.


Sources : sources internes à sofb.fr et nombreuses sources externes après enquête en ligne. Photo : Diana Parkhouse de pixabay.com

18 décembre 2022

L'énigme des disparus de Boutiers - Les interrogations

 
Cinquante ans que l'on cherche les Méchinaud, cette famille disparue dans la nuit de Noël 1972. S'est-elle évanouie à Cognac ou dans les environs immédiats de cette ville située en Charente ? Est-elle partie pour une nouvelle vie ou pour un sombre destin ? Cinquante ans de recherches régulières, de sondages de terrains et de plongées dans l'eau trouble pour tenter de retrouver ces habitants de Boutiers-Saint-Trojan ainsi que leur voiture, une Simca 1100. Cinquante ans de mystère et d'interrogations. Retour sur les personnages principaux adultes en lien avec l'Affaire des disparus de Boutiers :

Jacques Méchinaud

On pouvait logiquement le déduire à l'étude du déroulement de l'affaire, on en trouve confirmation, au moment des Fêtes de Noël 1972, Jacques Méchinaud, 31 ans, "bénéficie de quelque jours de vacances"(JB). Le père de famille travaille à l'usine Saint-Gobain Emballages proche de son domicile à l'entrée de Boutiers, qu'il habite depuis deux ans et demi (CL 01/73). Bien considéré par ses collègues, il s'occupe de l’entretien des machines "et, en mécanicien doué, enchaîne les « extras », notamment pour les agriculteurs des alentours."(JB)

Pierrette Méchinaud

La jeune femme de 29 ans est la femme de Jacques Méchinaud. Elle est femme au foyer et s'occupe de ses deux petits garçons de 7 et 4 ans, Eric et Bruno.

Maurice B. 

Au moment des faits, cela fait deux ans que Maurice B., ouvrier viticole âgé de 30 ans, fréquente sa voisine durant l'absence de son mari. L'homme indique « Mes parents avaient la maison voisine de celle des Méchinaud, les jardins étaient séparés d’un simple grillage. » (M)

Jean-Paul Méchinaud

Jean-Paul est proche de son frère Jacques parce qu'ils sont les deux derniers garçons au sein de la fratrie de 11 enfants. Jean-Paul et son épouse avaient compris les difficultés du couple quelques mois avant la disparition des parents et des deux enfants. C'était lors de la Foire-expo d'Angoulême : « On était assis à discuter. Jacques et Jean-Paul prenaient une bière. » (SO et L) 

Annie H

Avec son frère Jean-Paul, la sœur de Jacques Méchinaud avait exprimé en 2010 "son souhait que de nouvelles investigations puissent être menées." Elle vit en Vendée. (SO°)

Bernard H (autre nom)

Bernard H. est un collègue de Jacques Méchinaud et aussi un voisin. Il connait le disparu au moins depuis son mariage, puisqu'avant la disparition il l'"a fréquenté pendant huit ans". (L + autre)

Les F

Monsieur et Madame F. sont, selon la Presse de l'époque, les amis chez qui les Méchinaud sont allés passer le réveillon de Noël. Le moment où la décision de réveillonner chez les F. a été prise n'est pas indiquée. Ils seraient les dernières personnes à avoir vu la famille Méchinaud vivante.

Monsieur X

Monsieur X est le "copain de régiment" que, selon Maurice B., Jacques Méchinaud serait allé voir en Vendée peu avant la disparition de la famille. Aucune autre information à son sujet n'a été divulguée.

La maison des Méchinaud extraite du journal de l'ORTF diffusé après la disparition (source INA)
RAPPEL DES DATES CLÉS DE L'AFFAIRE DES DISPARUS DE BOUTIERS. FIN 1972 :

Samedi 16 décembre

- Par une voisine, Jacques Méchinaud aurait appris que sa femme le trompait. (différentes sources dont M)

Lundi 18 décembre

- Maurice B. l'amant, est prévenu par une amie que le mari "est au courant". (M)

Mercredi 20 décembre

- Maurice B. voit Pierrette Méchinaud alors qu'elle est à sa fenêtre et lui dehors. Elle lui confirme que quelqu’un l'avait dit a son mari. (M)
- Maurice B. constate qu' "Elle avait des marques de strangulation, un œil poché, (...)". (différentes sources dont M)
- "Elle avait reçu des coups de son mari quand il avait appris sa relation avec Maurice. C’était deux jours avant la disparition". (CL)
- Jacques Méchinaud s'absente dans la journée, un aller-retour. Il aurait rendu visite à « un copain de régiment en Vendée ». (M°)

Jeudi 21 décembre

- Jacques Méchinaud s'absente de nouveau dans la journée, un aller-retour pour la même raison. (M°)

Dimanche 24 décembre 

- "Mr F. se souvient : « Nous avons passé l'après midi ensemble. Nous nous sommes promenés en voiture avec nos enfants. » (CL 08/09/78)
- Maurice B. réveillonne en famille dans la maison voisine des Méchinaud. Il constate que la voiture du couple est absente. (M)
Monsieur F. indique ensuite « Puis nous avons réveillonné. L'ambiance était très détendue. » (CL 08/09/78) 

Lundi 25 décembre 

 - La voiture des Méchinaud étant toujours absente, Maurice B. est pris d'un doute, et comme il a une clé, entre dans la maison des Méchinaud. Constatant que le poêle est éteint, il décide de contacter le mari de la soeur de Pierrette, qu'il connait par un club de sport local. (M)
- Les deux hommes voient les cadeaux intacts pour les enfants sous le sapin, et un chéquier bien en évidence sur le frigo. (M)
- Le beau-frère de Pierrette signale l'absence de la famille à la Gendarmerie (M) qui ne donne pas suite, en raison du délai légal.
- "La famille (NdR Laquelle ?) elle, s’étonne en revanche de ne pas avoir de nouvelles car un repas est prévu le jour de Noël." (JB + autre source)

Mardi 26 décembre

- Des membres de la famille Méchinaud (11 enfants) ou de la famille de Pierrette, se rendent-ils à Boutiers pour prendre des nouvelles des Méchinaud ? L'histoire ne dit rien à ce sujet.

DÉBUT 1973

Jeudi 4 janvier

- "La famille l'a appris 10 jours après Noël, c'est-à-dire début janvier, par la presse, tout simplement", indique Jean-Paul Méchinaud. Il rappelle que son sentiment à l'époque était la disparition "(...) parce qu'il avait fait plusieurs voyages en Australie." (RTL)

Samedi 6 janvier

- Pierre E., le père de Pierrette, signale à la gendarmerie la disparition de sa fille, de son beau-fils et de ses deux petits-enfants.(SO 24/12/12)
- "Début janvier 1973, l’enquête débute." (FS) 

Au delà de la question "Où sont les Méchinaud", les interrogations sur cette mystérieuse disparition ne manquent pas. L'histoire ne dit pas, en effet, combien il est difficile de conduire dans le brouillard épais à une époque où l'éclairage des voitures était plutôt limité. L'installation de feux additionnels dits "de brouillard" était d'ailleurs un accessoire prisé (la Simca 1100 en était-elle équipée ?). Il n'est pas non plus dit que la couleur rouge grenat était au contraire une teinte parmi les rares permettant de distinguer un véhicule en de telles circonstances, et si la famille a été accompagnée par leurs hôtes jusqu'à la rue à leur départ (il s'agit généralement d'un usage), ni dans quelle direction sont partis les Méchinaud. 

Ils auraient effectué un parcours de 3800 mètres situé en partie en ville dans une nuit de fête durant laquelle d'autres voitures devaient probablement, lentement, circuler.

Dans ce brouillard, qui ne permet pas de distinguer "à plus de trois mètres", comment conduire, avec certitude, vers un point de non retour sans le risque, justement, de ne pas y arriver ? Et sans éveiller de protestation du conjoint ?

L'histoire est muette aussi, à propos des voyages en Australie qu'aurait effectué Jacques Méchinaud, et notamment des dates, pas plus qu'elle ne parle, comme pour du supposé argent en espèces, de l'existence ou non d'un ou de plusieurs passeports. On s'interroge aussi sur la nécessité d'effectuer un ou plusieurs déplacement sur une distance non négligeable, en Vendée, trois jours à peine avant la disparition. Pour obtenir une arme, une seconde voiture ? Et dans ce cas plus besoin de, si on peut dire, simplement précipiter sa voiture et les occupants dans un gouffre.

L'histoire ne dit pas non plus quand s'est décidé que les Méchinaud aillent passer le réveillon chez les F., alors que dinde et huitres attendent dans leur réfrigérateur. Après une promenade en voiture, le repas de Noël chez les F. n'était-il pas plutôt pour les enfants qui ne devaient pas faire attendre Monsieur F. "qui venait les chercher" comme l'indique à l'époque le journal télévisé ?

Sources :

(CL) La Charente Libre

(M) https://www.marianne.net/societe/police-et-justice/disparus-de-boutiers-50-ans-apres-la-justice-sur-les-traces-de-la-famille-mechinaud

(M°) D'autres sources indiquent "Il s'absente pour deux jours" "Il s'absente plusieurs jours"

(L)https://www.liberation.fr/histoires/2003/02/04/le-mystere-de-la-simca-1100-grenat_429794/

(JB) https://jeanberthelot.com/2017/06/01/disparus-de-boutiers-le-deuil-impossible/

(SO) Site du journal Sud-Ouest

(SO°) https://www.sudouest.fr/charente/angouleme/a-chaque-noel-on-y-pense-9759753.php

(FS)http://archive.francesoir.fr/actualite/faits-divers/recherche-d-une-famille-disparue%E2%80%A6-en-1972-159799.html

(RTL) https://www.rtl.fr/actu/debats-societe/les-disparus-de-boutiers-7789076944 [33:57]

Image en-tête : Pexels.com/skitterphoto

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