02 février 2023

Le voile se lève sur l'Affaire Dupont de Ligonnès


L'Affaire Dupont de Ligonnès. Depuis 2011, le père de famille, Xavier Dupont de Ligonnès, a quitté Nantes, laissant derrière lui les corps enterrés de sa femme et de ses enfants. Un drame qui reste encore dans toutes les mémoires, et sur lequel le voile se lève peu à peu. EXPLICATIONS.

Une partie du travail des journalistes consiste, après un événement, à recueillir les dires des témoins. Cela peut être leur témoignage visuel, ou simplement leur opinion. Dès lors que cette observation, avis ou sentiment sur un sujet est publié, cela devient un fait. Un fait qui va au delà de l'événement premier, le sujet de base.

Le fait premier se déporte ainsi vers le témoin. La réaction du témoin ressemble au commentaire d'une personnalité politique, elle crée l'émergence d'un fait nouveau. D'un fait acté. Dans l'affaire Dupont de Ligonnès, lorsqu'un témoin, dans un restaurant-grill et western de Cholet voit le fugitif "portant un gros livre sur lui", cela devient un fait porté à la connaissance du public. Ensuite, lors de son passage dans l'un des couloirs de l'hôtel Formule 1 de Roquebrune-sur-Argens, Xavier Dupont de Ligonnès porte de nouveau son gros livre, à la main. Sur les images prises par la caméra située dans le couloir, aurait été identifié Glacé, de Bernard Minier, un roman de 560 pages au format 154 x 240 mm, paru en février 2011.

Viennent ensuite les hypothèses. Dupont de Ligonnès aurait jeté un coup d'œil à la caméra installée dans le couloir à ce moment précis. Pour certains il transmet donc un message : Le contenu du livre. Essayons de "déporter" le message. Pourrait-il dire, sur un ton léger : "J'avais oublié mon livre dans la voiture". Ou bien, de façon plus sérieuse : "Devinerez-vous que j'ai creusé les pages de ce livre comme dans les films d'espionnage pour y cacher de l'argent et des faux-papiers ?"  Au delà d'une interprétation possible, il reste une question factuelle : Qu'est finalement devenu ce mystérieux et imposant livre ?

Un fait. Un livre. Un fait. En quittant l'hôtel Formule 1 de Roquebrune-sur-Argens à pied, Xavier Dupont de Ligonnès est vu portant "un sac à dos et une housse de costume en bandoulière". L'hypothèse admise est que la housse cachait sa carabine pour se suicider. Une autre : Les deux sacs contenaient son futur. Nous verrons plus loin lequel.

Toujours John List

Pour rappel, le père de Xavier Dupont de Ligonnès est décédé le 20 janvier 2011. On sait qu'il lui lègue la carabine qu'il possédait. XDDL obtient sa licence de tir le 2 février. Le roman Glacé a été publié le 24 février. Le 12 mars, après avoir hérité du fusil de son père, Xavier Dupont de Ligonnès achète des cartouches et un silencieux. Faute d'avoir retrouvé l'arme il est peu probable que l'on en apprenne davantage.
Cependant, un autre livre attire l'attention, un roman de l'auteur à succès américain Harlan Coben. Fait : Le livre a été retrouvé au domicile des Ligonnés. Le titre en Français est "Disparu à jamais", tandis que le titre en Anglais est plutôt "Parti pour de bon". La mort versus le non retour.

Il est possible de comparer la tuerie de Nantes en avril 2011 avec un événement similaire s'étant produit aux Etats-Unis quarante années auparavant, l'Affaire John List. Quelques temps avant de tuer sa famille le 9 novembre 1971, John List travaillait à Jersey City. Le romancier Harlan Coben est né le 4 janvier 1962 à Newark, ville située sur l'autre rive de la baie. La maison des List se trouvait à Westfield, un peu au sud-ouest de Newark. Durant son enfance Harland Coben vit à Livingston, situé à une quinzaine de kilomètres au nord. Il a 9 ans et demi lorsque se déroule la tuerie au 431 Hillside Avenue à Westfield. Lui seul pourrait dire s'il a été marqué par cette affaire, si cela plus tard l'a influencé pour écrire des thrillers. 

Xavier Dupont de Ligonnès a-t-il pour son funeste projet été influencé par le procès lié à cet événement alors qu'il se trouvait sur le sol américain en compagnie de son ami Michel ? Faits. Hypothèses.

XDDL et les sept morts

Près de sept ans se sont écoulés depuis la disparition de Xavier Dupont de Ligonnès lorsque soudain, le 9 janvier 2018, une opération de police est lancée dans un monastère isolé de Roquebrune-sur-Argens. Un paroissien a crû reconnaitre XDDL sous l'apparence d'un moine, cela crée une effervescence policière et médiatique. Quelques jours après, le  samedi 20 janvier 2018, la chaîne France 2 dévoile une interview de Michel, l'ami de Xavier de Ligonnès, dans son émission "13h15 le samedi".
Co-incidence ou hasard, à peine six semaines plus tard, le vendredi 2 mars 2018, Michel met fin à ses jours chez lui. Quant à l'autre ami de "Xav", Emmanuel, il décède à son tour le 18 janvier 2019.
En plus de ses quatre enfants et de sa femme, au cours du temps l'Affaire Dupont de Ligonnes aura fait sept morts.

Le nouveau départ

Une fuite, ça se prépare. Celle de Xavier Dupont de Ligonnès a été anticipée, et pourtant, à proprement parler, elle n'en est pas une. Ceci parce qu'il y a une ambiguïté liée au besoin d'argent. Il s'agit pour lui d'un nouveau départ, d'une nouvelle liberté, et en même temps, dans les premiers jours, d'une continuité de vie dans le cadre de ses habitudes professionnelles.

Xavier Dupont de Ligonnès travaillait comme enquêteur qualité rémunéré ou "Client Mystère" pour une société spécialisée. Il visitait des hôtels en France et rédigeait ensuite ses impressions. Ceux qui ont effectué des missions pour ce type d'entreprises savent que c'est peu rémunéré, que la participation aux frais de déplacement est faible, que le produit acheté ou la prestation testée est remboursé en toute ou partie, et surtout, que le paiement de la mission n'intervient pas immédiatement.

XDDL visite discrètement des hôtels économiques et c'est d'ailleurs probablement pourquoi il se rend si loin de Nantes fin mars 2017 aux portes de Chateauroux dans l'Indre, dans la zone commerciale de Saint-Maur, où est justement implanté un hôtel de l'enseigne Première Classe. Les faits : Avant de repartir, il en profite pour faire plusieurs achats dans un magasin de bricolage proche, notamment  un rouleau de sacs-poubelles de grande taille et un paquet de dalles adhésives en plastique pour le sol. L'hypothèse : Il achète aussi une tente 2 secondes dans le Décathlon situé presque en face de l'hôtel.

 
 
Autrement dit, ce qui semble en apparence un parcours erratique à travers le pays est d'abord, après son départ définitif de Nantes, le moyen pour Xavier Dupont de Ligonnès, en terminant sa mission, de récupérer ultérieurement de l'argent par virement sur son compte rattaché. Ensuite, son parcours avait été préparé longtemps à l'avance.

Ce qu'il faut garder à l'esprit, c'est que le jour où Xavier Dupont de Ligonnès quitte l'hôtel Formule 1 de Roquebrune-sur-Argens, personne ne le recherche, personne ne le remarque, personne ne s'intéresse à lui. Il peut aller librement où bon lui semble. Ce n'est que quatre jours plus tard, le 19 avril 2011, qu'une enquête pour disparition inquiétante est ouverte, et c'est seulement le 21 avril qu'un avis de recherche pour la famille disparue est lancé.

Après son départ pour un périple dans le Sud, Xavier Dupont de Ligonnès a aussi bien pu faire du stop, prendre l'autocar, se faire héberger dans un camp de gens du voyage, se dissimuler dans un bois, marcher de nuit. La topographie et l'environnement de la région, le maquis, permettent cela. Qui fait attention à un vagabond que personne ne recherche encore ? D'ailleurs, ce n'est qu'à partir de l'avis de recherche et de l'inscription au fichier des véhicules recherchés que, dans la nuit du 21 au 22 la Citroën C5 bleue de XDDL, pourtant présente sur le parking du Formule 1 depuis le 15, est repérée par les gendarmes.

La situation de Xavier Dupont de Ligonnès devient problématique seulement à partir du 21 avril. Ceci étant, si l'homme, qui reste présumé innocent, a, 40 ans plus tard, imité John List dans sa méthode criminelle, et cette hypothèse est au cœur du sujet, il aura imaginé une suite similaire. Pour rappel, en 1971 aux États-Unis, un mois s'est écoulé avant que l'on ne découvre la scène de crime. XDDL aura probablement pensé qu'en France trois semaines s'écouleraient avant la découverte. Et en effet, à Nantes, au delà des précautions prises pour masquer les odeurs, ce n'est que parce qu'une jeune policière a remarqué la gamelle du chien en équilibre sous une planche placée sous la terrasse que les corps ont été découverts.

A suivre...


Sources : L'auteur ayant suivi les évolutions de l'Affaire Dupont de Ligonnès entre Avril 2011 et Octobre 2016, les informations utilisées proviennent de notes personnelles auxquelles il faut ajouter quelques vérifications réalisées en janvier 2023, comme LeParisien.fr, Var Matin, Europe 1,... Ainsi que Wikipédia et bien entendu Google Maps.

22 janvier 2023

Xavier Dupont de Ligonnès serait-il toujours vivant ?

L'Affaire Xavier Dupont de Ligonnès comporte un nombre important de similitudes avec une affaire plus ancienne qui s'est déroulée aux Etats-Unis en 1971, l'Affaire John List. Quarante ans et sept mois séparent les deux tueries de masse. Une autre affaire tristement célèbre s'étant déroulée en France en janvier 1993 attire aussi l'attention, celle de Jean-Claude Romand.

Une partie de la population pense que Xavier Dupont de Ligonnès s'est suicidé, une autre partie qu'il est toujours vivant. Cet article penche pour la seconde version et vous révèle même ce que pourrait être la vie de Xavier Dupont de Ligonnès actuellement. Avertissement : les similitudes relevées sont en gras.

Xavier Dupont de Ligonnès

La "tuerie de Nantes" ou Affaire Dupont de Ligonnès est une affaire criminelle dans laquelle cinq membres de la famille Dupont de Ligonnès ont été assassinés début avril 2011. Les corps d'Agnès Dupont de Ligonnès et de ses quatre enfants, Arthur, Thomas, Anne et Benoît, ont été retrouvés le 21 avril 2011 dans le jardin de leur maison située au 55 Boulevard Robert-Schuman à Nantes (Loire-Atlantique).

Le père de famille, Xavier Dupont de Ligonnès, âgé de 50 ans au moment des faits, est introuvable. Plus tard, on découvrira que l'homme, présumé innocent, a pris la fuite.

Le drame de Nantes en avril 2011 présente-t-il des similitudes avec les cas de John List aux Etats-Unis et de Jean-Claude Romand en France ?

John List

Âgé de 46 ans, John List a tué sa femme, sa mère et ses trois enfants à leur domicile dans le New Jersey, le 9 novembre 1971, puis il a disparu de la circulation. Il avait méticuleusement planifié les meurtres de ses proches et il s'est passé près d'un mois avant que quelqu'un ne soupçonne quoi que ce soit du drame.

Après avoir occupé un poste aux services financiers dans l'Armée, List est devenu en 1960 directeur des services comptables chez Xerox à Rochester dans l'Etat de New York. En 1965, il accepte un poste de vice-président et contrôleur dans une banque de Jersey City dans le New Jersey, et doit pour cela déménager avec sa famille. Famille qui s'installe dans un manoir victorien de 19 chambres à Westfield.

Malheureusement, quelques temps plus tard, la fermeture de la banque de Jersey City crée pour lui une crise financière qu'il cache à sa famille. Voulant assurer à ses proches le même train de vie, il continue comme si de rien n'était, donnant l'illusion qu'il part chaque matin au travail, alors qu'il passe ses journées à des entretiens d'embauche ou à la gare, lisant des journaux en attendant l'heure du retour au domicile. Cette situation a sans doute inspiré beaucoup de scénaristes depuis. Ensuite c'est pour John List la spirale, il détourne l'argent des comptes bancaires de sa mère afin d'éviter le défaut de paiement du manoir. Lorsque la situation devient plus critique, il encourage ses enfants à trouver un travail à temps partiel, sous un prétexte d'éducation alors que la réalité est toute autre. Et c'est quand il devient simple vendeur en assurances que le drame se prépare.

Le mardi 9 novembre 1971, il rentre dans son manoir de Westfield dans le New Jersey. Dans la cuisine, il tue sa femme en lui tirant dessus avec une arme à feu à l’arrière de la tête, et ensuite il tue sa mère qui se trouve à l'étage en lui tirant au dessus de l’œil gauche. Puis il attend que sa fille de 16 ans et son fils de 13 ans reviennent de l'école pour les abattre froidement. Cependant, John List a un autre fils, de 15 ans, absent parce que parti disputer un match de football. List se prépare donc un repas et se rend ensuite à sa banque pour fermer ses comptes bancaires ainsi que celui de sa mère, puis part assister au match de son fils. Il le ramène avec lui à la maison. Cette fois-ci il est obligé de tirer à plusieurs reprises sur l'adolescent, celui-ci ayant tenté de se défendre. List aura assassiné sa famille en utilisant sa propre arme de poing semi-automatique de 9 mm Steyr 1912 et le revolver Colt de calibre 22 de son père. Ensuite, il dîne et se couche.  

Le lendemain, avant de quitter la maison, il baisse le thermostat et met en route une station de radio religieuse. John List avait placé les corps de sa femme et de ses enfants sur des sacs de couchage dans la salle de bal du manoir. Celui de sa mère, il l'a laissé dans l'appartement qu'elle occupait dans le grenier. Sur le bureau de son étude, se trouvait une lettre de cinq pages destinée à son pasteur. Il avait aussi envoyé des courriers aux écoles des enfants et aux entreprises dans lesquelles les adolescents travaillaient à temps partiel, affirmant que les enfants seraient partis en Caroline du Nord durant quelques semaines pour visiter leur grand-mère maternelle souffrante. Grand-mère maternelle qui en l’occurrence était réellement malade et à propos de laquelle List a déclaré plus tard que si elle était venue elle aurait été sa sixième victime.

Jean-Claude Romand

L'affaire Jean-Claude Romand est un événement qui s'est déroulé en France au début de 1993. Cette affaire a eu un fort retentissement dans le pays et plusieurs ouvrages ont été ultérieurement écrits sur le sujet. 

Pour résumer, Jean-Claude Romand est un homme qui cache à son entourage la vérité sur ses études et ses activités professionnelles, ceci durant dix-huit ans. Il vit de sommes d'argent escroquées au fil des ans dans son cercle de relations, à ses parents et beaux-parents, aussi bien qu'à sa maîtresse, auprès de laquelle il emprunte une importante somme d'argent. Le samedi 9 janvier 1993, quelques semaines avant d'avoir 39 ans, alors qu'il est à court de ressources financières, il tue son épouse avec un rouleau à pâtisserie, puis il tue ses deux jeunes enfants dans leur chambre en tirant à l'arrière du crâne avec une carabine 22 Long Rifle équipée d'un silencieux.

Le jour même, il part déjeuner chez ses parents dans le Jura. Parvenu sur place il les tue, ainsi que leur chien labrador, toujours avec sa carabine et de dos. Ensuite il reprend sa voiture pour aller à Paris pour passer la soirée avec son ancienne maîtresse, qu'il tente aussi de tuer, en l'étranglant.

Regard sur la vie de Dupont de Ligonnès

John List s'était recréé une vie similaire à la précédente dans un autre État des USA. Sorte de nouveau départ ou moyen de se dissimuler dans la respectabilité ? Femme, enfants, travail, église, il avait une nouvelle vie en Virginie. S'il a été retrouvé, c'est surtout grâce à une nouvelle émission télévisée créée en 1988 : America’s Most Wanted. Son but ? Montrer certains des plus grands fugitifs américains sur les écrans de télévision à travers le pays. 

Environ un an après sa création, en 1989, l'émission AMW diffuse le cas de John List. Un buste actualisé de List est réalisé par un sculpteur pour l'occasion et montré durant l'émission. Plusieurs appels sont reçus au standard et parmi eux "celui d'une dame qui a appelé pour dire que le buste ressemblait beaucoup à l'un de ses voisins, Robert P. Clark."* La vie similaire à List de Clark a facilité la tâche des enquêteurs pour retrouver l'auteur des meurtres de Jersey City, 18 ans après le drame.

Le procès retentissant de John List a lieu au cours de 1990. Cette année-là, Xavier Dupont de Ligonnès fait un périple en voiture de plusieurs mois aux Etats-Unis avec un ami.

Xavier De Ligonnès, un regard souvent ailleurs

En avril 2011, Xavier de Ligonnès est financièrement depuis plusieurs mois aux abois. Il multiplie les échecs professionnels et se trouve dans une situation financière critique. Rattrapé par les dettes, il est notamment poursuivi par une ancienne maîtresse. Elle souhaite récupérer une importante somme d'argent qu'elle lui a prêté et pour cela, elle mandate un huissier, qui se présente d'ailleurs devant la maison des Ligonnès le 5 avril 2011 et trouve porte close.

Les corps des enfants Dupont de Ligonnès ont été découverts enterrés à l'extérieur de la maison en location qu'occupait la famille à Nantes. Arthur, l'ainé, avait 20 ans. Il a été tué de deux balles dans la tête. La fille du couple, Anne, avait 16 ans et Benoit le plus jeune fils 13 ans. Anne a reçu deux balles dans la tête tandis que Benoît a reçu trois balles dans la tête et deux dans le thorax. A-t-il tenté de se défendre ?

Xavier Dupont de Ligonnès a un autre fils, absent de Nantes, Thomas. Le 5 avril à 23h45, il le ramène avec lui à la maison. Il avait 18 ans. Il aurait été tué en dernier. Il a reçu deux balles dans la tête et une balle dans le thorax. Les victimes ont toutes été tuées à l'aide d'une carabine 22 Long Rifle équipée d'un silencieux. Les deux chiens du couple Dupont de Ligonnès, des labradors, ont également été tués par balles.

Agnès Dupont de Ligonnès, épouse de Xavier et mère des enfants, a 48 ans au moment du drame. Elle occupe un travail à temps partiel dans une école tandis que son aîné Arthur a un travail à temps partiel dans une pizzeria. Agnès a reçu deux balles dans la tête.

Il existe de nombreuses similitudes entre l'Affaire John List et la tuerie de Nantes, et plusieurs coïncidences, ce qui n'en est pas moins étrange. Autour de John List, il y a des références religieuses, la lettre au pasteur, le devenir de ses proches dans l'au-delà. Interrogé en 2002 sur ses motivations, List a notamment "souligné la croyance qu'il souhaitait que sa famille fasse un voyage paisible et rapide au paradis*". Quant à la tuerie de Nantes, les références religieuses y sont présentes à plusieurs occasions et des objets religieux accompagnaient chaque corps retrouvé enterré. Les courriers aux écoles des enfants font aussi partie du scénario.

Une nouvelle vie

Alors que John List a repris sa vie d'avant pendant 18 ans, Jean-Claude Romand, lui, s'était déjà inventé une autre vie. En tout état de cause, il a lui aussi été arrêté.

Si Xavier Dupont de Ligonnès, présumé innocent, est l'auteur des assassinats de Nantes en avril 2011, et qu'il s'est inspiré de ceux perpétrés en 1971 et 1993, pourquoi n'aurait-il pas copié jusqu'au bout la vie de John List ? List avait réussi à retarder la découverte des corps d'environ un mois. Dupont de Ligonnès de près de deux semaines.  

S'il est toujours vivant depuis sa fuite en 2011, et après toutes ces années de cavale, Xavier Dupont de Ligonnès, connu pour avoir une aisance verbale et un sourire commercial, pourrait fort bien vivre de nouveau en couple, avoir un enfant et travailler pour une entreprise de Télécom. Avec comme nouveau nom Robert ?

Sources

Wikipédia, Wikipedia EN, https://abcnews.go.com/2020/story?id=132646&page=1, compilation personnelle, *https://www.historic-newspapers.com/blog/the-list-murders/, https://www.leparisien.fr/faits-divers/xavier-de-ligonnes-a-contacte-au-moins-quatre-anciennes-amies-avant-les-meurtres-23-12-2011-1781331.php?ts=1634660891195, https://www.parismatch.com, Photos : recadrages d'images largement reprises.

14 janvier 2023

Disparition de Cécile Vallin : Une jeune fille désemparée ?

Cécile Vallin a disparu le dimanche 8 juin 1997 dans la vallée de la Maurienne, en Savoie. Née et ayant passé son enfance et sa pré-adolescence en Normandie, elle habitait à Saint-Jean-de-Maurienne depuis trois ans. Elle a disparu après avoir été aperçue marchant au bord d'une route et depuis ce jour, on a perdu toute trace de la jeune fille, âgée au moment de 17 ans et demi. ANALYSE.

Le samedi 7 juin 1997, la veille de sa disparition, Cécile Vallin avait organisé une petite fête dans l'appartement de fonction de son beau-père, proviseur du Lycée, et de sa mère, professeur, absents pour le weekend. Sans leur autorisation. Au cours de la soirée, avec la jeune fille mineure ne se trouvent, ni Jeremy, son petit ami depuis deux ans, ni Sandrine, sa meilleure amie, ni Kamel, son confident un peu plus âgé. C'est un autre entourage de camarades lycéens qui est présent dans l'appartement.

Les quatre garçons sont Sébastien, dont on sait qu'il a "flirté" avec Cécile au cours de la soirée, ainsi que Karim, Mathias et Benoît. A part leurs prénoms, on sait peu de choses des garçons. Ils auraient été invités à bénéficier du mur d'escalade situé dans l'enceinte du Lycée. Cécile faisant partie des grimpeurs de la section d'escalade, les membres de la section allaient faire de l'escalade le weekend, on était un weekend et, semble-t-il, il faisait beau. Alors ces jeunes gens étaient-ils étrangers à cette section ou bien Cécile ce weekend-là devait-elle rester au Lycée ?

Le départ

Le dimanche 8 juin dans l'après-midi, à une heure correspondant davantage à celle où l'on met fin à ses activités dominicales ou du weekend pour rentrer, c'est à ce moment-là que Cécile Vallin prend la décision de partir de chez elle. Elle ne laisse aucun mot. S'est-elle absentée pour quelques instants, le temps de trouver une cabine téléphonique afin de passer un appel intraçable sur la facture de ses parents ? Ou a-t-elle entrepris de se diriger vers l'endroit où elle pensait que se trouvait son petit ami Jérémy, faisant sur son chemin régulièrement des tentatives d'appels ?

Cécile Vallin serait partie du domicile familial sans son portefeuille. Dans les différents documentaires, il est précisé qu'elle n'aurait pas emporté d'argent liquide bien que l'on ignorât le montant contenu dans le portefeuille avant son départ. Il est dit aussi que la jeune fille serait partie avec sa carte nationale d'identité (CNI), son attestation de sortie du territoire étant mineure, une carte de retrait bancaire, une carte téléphonique (carte prépayée spéciale cabines des années 1990) et ses clés. En apparence sans sac elle aurait mis tous ces documents dans les poches de son pantalon (ou elle les aurait jetés quelque part ?).

Les recherches effectuées n'ont rien donné et ce cas de personne disparue est venu rejoindre la longue liste des affaires non résolues. Depuis que la disparition de Cécile Vallin bénéficie d'une large couverture médiatique, les reportages s'enchaînent sur le sujet. L'affaire a quelque chose d'étrange et de pesant que le paysage de montagne accentue. Les témoignages en Savoie sont minoritaires. Cécile doit passer son Bac de Philo la semaine suivante. Elle est en classe de Terminale littéraire, pourtant elle a envie d'être "prof de sport". A la rentrée, elle prévoit de s'installer avec sa meilleure amie à Grenoble en colocation. Projet qu'elle a hâte de réaliser pour "enfin" quitter le foyer familial.

Le dimanche 8 juin 1997

Le samedi 7 juin 1997, une soirée d'adolescents avec une jeune fille et quatre garçons s'est déroulée dans l'appartement où habitait Cécile. Le récit qui en a été rapporté peut être résumé en deux mots : avec modération. Quoiqu'il en ait été, quelque chose a justifié que Cécile, dès le lendemain matin, tente de joindre sa sœur au téléphone. Voici la chronologie connue ou estimée du dimanche 8 juin :

- Avant 10h44 emploi du temps de Cécile inconnu.

- 10h45 Elle tente sans succès de joindre sa demi-sœur au téléphone, celle-ci étant absente, c'est une cousine colocataire qui décroche, l'échange est bref.

- Début d'après-midi, heure inconnue, Sébastien retourne dans l'appartement où réside Cécile, jusqu'à 

- 16h45, heure à laquelle Cécile appelle sa meilleure amie Sandrine, après le départ de Sébastien. Elle lui demande de venir, ce que son amie ne peut faire. La conversation dure environ 30 mn. Ensuite, à

- 17h18 Cécile appelle son père en Normandie pour lui confier ses inquiétudes, la communication dure jusqu'à 17h24.

- Autour de 17h30-35, départ estimé de Cécile de son domicile. Elle ferme la porte à clé.

- Vers 17h35 [estimé] Une personne aurait aperçu Cécile près de la gare de Saint-Jean-de-Maurienne.

La distance entre le domicile de Cécile et l'école de Pontamafrey représente environ 5,5 km à l'échelle 200m de Google Maps. Pour une vitesse de marche estimée à 5-6 km/heure cela donne environ une heure de marche. Le site Mappy indique 1h13 par le centre-ville de Saint-Jean, ce qui confirme une heure de marche environ par la gare.

La cabine téléphonique de la Gare de Saint-Jean en septembre 2012 (Google Street View)

- Vers 17h40 [estimé] Un témoin aurait vu Cécile près d'une cabine téléphonique (laquelle ?)

- 17h45 Une camarade de Cécile, Myriam, la voit marcher le long de la D906 à la sortie de Saint-Jean-de-Maurienne, en direction de la D1006, sans sac apparent.

- Vers 18h00 [estimé] L'ancien curé de Saint-Jean aurait aperçu Cécile sur le pont enjambant l'Arc.

- Un témoin à 18h15 est persuadé d'avoir croisé Cécile une première fois (lieu ?) [lieu estimé : avant la zone d'activités - pour lui après la zone d'activités]

- Vers 18h45, Cécile est aperçue une seconde fois devant (ou auprès) de l’École élémentaire de Pontamafrey par le témoin de 18h15 [donc à son retour].

Cabine télecom située entre la gare et la D906, celle de Pontamafrey (avr. 2008), la station service (oct. 2009)

- Cécile aurait été vue par un témoin à une station service sur la D1006 à l'arrière d'une Peugeot 205 rouge immatriculée dans la région de Turin. On traverse Pontamafrey depuis l'école élémentaire par une rue débouchant sur la D1006, principal axe routier venant de Turin, peu après la cabine téléphonique, et la station service se trouve seulement quelques centaines de mètres plus loin. On peut imaginer une voiture prenant en stop une jeune fille à la station service, on peut difficilement imaginer un automobiliste enlever une jeune fille dans Pontamafrey et s'arrêter ensuite pour faire du carburant à la sortie du village. En tout état de cause l'heure du témoignage n'est pas révélée. Heure estimée 19h00.

Le choc des émotions

Une situation inédite dans la vie de jeune femme de Cécile Vallin s'est probablement créée au cours du weekend des 7 et 8 juin 1997. Un événement entraînant une cascade de questionnements relatifs à ses projets scolaires et sentimentaux ? Quelque chose de plus important ? Ne réussissant pas à exprimer ses inquiétudes, surtout par téléphone, aux personnes avec lesquelles elle était la plus proche, pour des raisons liées aux circonstances, une densité émotionnelle l'aurait-elle désemparée ? 

Certains témoignages parlent d'une Cécile triste, d'autres d'une Cécile énervée. Serait-elle sortie dans l'espoir de résoudre d'abord son problème de loyauté vis à vis de son petit ami Jérémy ? Quels étaient d'ailleurs ses projets avec lui, pour le moyen terme ou par exemple pour les prochaines vacances scolaires ? Pensait-elle rencontrer quelqu'un sur le parking situé au pied de la montagne et proche de l'Ecole élementaire ? Quelle a été sa dernière décision ?

A propos du témoignage de l'ancien curé de Saint-Jean

Si l'ancien curé de Saint-Jean a aperçu Cécile sur le pont enjambant l'Arc autour de 18h00 en allant vers Pontamafrey comme sa progression à pied peut le laisser supposer, il s'agit d'un élément s'inscrivant logiquement dans la chronologie. Si l'heure de l'observation se situe vers 19h00 ou plus, il s'agirait de Cécile retournant vers Saint-Jean-de-Maurienne.

A propos du platane sur la D906 marqué d'une croix rouge

Voici le platane marqué d'une croix rouge pour l'émission "Non Élucidé" du 4 février 2021 (Image Google Street View). S'agit-il d'un arbre pris au hasard pour la reconstitution ? Si cet arbre est celui où Cécile a été réellement vue par son amie, il est situé un peu plus loin que "la sortie" de la ville. Il faut plus de temps pour y arriver. Un décalage de quelques minutes dont on pourrait déduire que Cécile serait partie juste après avoir raccroché d'avec son père.

A propos de cet article

Un concours de circonstances a conduit à cette analyse de la disparition il y a 25 ans de Cécile Vallin (voir le commentaire sous l'article). Compte tenu du contexte entourant cette affaire, contrairement  à l'habitude rédactionnelle, une ou plusieurs modifications, précisions ou mises à jour pourraient avoir lieu ultérieurement.

Sources :

- Émission L'Heure du Crime "La disparition de Cécile Vallin", présentée par Jean-Alphonse Richard sur RTL.

- Émission Les Cicatrices de la Justice de Farrah Youbi "Cécile où es tu?", présentée par Paul Lefèvre sur Planète +.

- Émission Non Élucidé "L'Affaire Cécile Vallin", présentée par Arnaud Poivre d'Arvor sur RMC Story.

- Page Wikipédia Affaire Cécile Vallin

- Google Maps

18 décembre 2022

L'énigme des disparus de Boutiers - Les interrogations

 
Cinquante ans que l'on cherche les Méchinaud, cette famille disparue dans la nuit de Noël 1972. S'est-elle évanouie à Cognac ou dans les environs immédiats de cette ville située en Charente ? Est-elle partie pour une nouvelle vie ou pour un sombre destin ? Cinquante ans de recherches régulières, de sondages de terrains et de plongées dans l'eau trouble pour tenter de retrouver ces habitants de Boutiers-Saint-Trojan ainsi que leur voiture, une Simca 1100. Cinquante ans de mystère et d'interrogations. Retour sur les personnages principaux adultes en lien avec l'Affaire des disparus de Boutiers :

Jacques Méchinaud

On pouvait logiquement le déduire à l'étude du déroulement de l'affaire, on en trouve confirmation, au moment des Fêtes de Noël 1972, Jacques Méchinaud, 31 ans, "bénéficie de quelque jours de vacances"(JB). Le père de famille travaille à l'usine Saint-Gobain Emballages proche de son domicile à l'entrée de Boutiers, qu'il habite depuis deux ans et demi (CL 01/73). Bien considéré par ses collègues, il s'occupe de l’entretien des machines "et, en mécanicien doué, enchaîne les « extras », notamment pour les agriculteurs des alentours."(JB)

Pierrette Méchinaud

La jeune femme de 29 ans est la femme de Jacques Méchinaud. Elle est femme au foyer et s'occupe de ses deux petits garçons de 7 et 4 ans, Eric et Bruno.

Maurice B. 

Au moment des faits, cela fait deux ans que Maurice B., ouvrier viticole âgé de 30 ans, fréquente sa voisine durant l'absence de son mari. L'homme indique « Mes parents avaient la maison voisine de celle des Méchinaud, les jardins étaient séparés d’un simple grillage. » (M)

Jean-Paul Méchinaud

Jean-Paul est proche de son frère Jacques parce qu'ils sont les deux derniers garçons au sein de la fratrie de 11 enfants. Jean-Paul et son épouse avaient compris les difficultés du couple quelques mois avant la disparition des parents et des deux enfants. C'était lors de la Foire-expo d'Angoulême : « On était assis à discuter. Jacques et Jean-Paul prenaient une bière. » (SO et L) 

Annie H

Avec son frère Jean-Paul, la sœur de Jacques Méchinaud avait exprimé en 2010 "son souhait que de nouvelles investigations puissent être menées." Elle vit en Vendée. (SO°)

Bernard H (autre nom)

Bernard H. est un collègue de Jacques Méchinaud et aussi un voisin. Il connait le disparu au moins depuis son mariage, puisqu'avant la disparition il l'"a fréquenté pendant huit ans". (L + autre)

Les F

Monsieur et Madame F. sont, selon la Presse de l'époque, les amis chez qui les Méchinaud sont allés passer le réveillon de Noël. Le moment où la décision de réveillonner chez les F. a été prise n'est pas indiquée. Ils seraient les dernières personnes à avoir vu la famille Méchinaud vivante.

Monsieur X

Monsieur X est le "copain de régiment" que, selon Maurice B., Jacques Méchinaud serait allé voir en Vendée peu avant la disparition de la famille. Aucune autre information à son sujet n'a été divulguée.

La maison des Méchinaud extraite du journal de l'ORTF diffusé après la disparition (source INA)
RAPPEL DES DATES CLÉS DE L'AFFAIRE DES DISPARUS DE BOUTIERS. FIN 1972 :

Samedi 16 décembre

- Par une voisine, Jacques Méchinaud aurait appris que sa femme le trompait. (différentes sources dont M)

Lundi 18 décembre

- Maurice B. l'amant, est prévenu par une amie que le mari "est au courant". (M)

Mercredi 20 décembre

- Maurice B. voit Pierrette Méchinaud alors qu'elle est à sa fenêtre et lui dehors. Elle lui confirme que quelqu’un l'avait dit a son mari. (M)
- Maurice B. constate qu' "Elle avait des marques de strangulation, un œil poché, (...)". (différentes sources dont M)
- "Elle avait reçu des coups de son mari quand il avait appris sa relation avec Maurice. C’était deux jours avant la disparition". (CL)
- Jacques Méchinaud s'absente dans la journée, un aller-retour. Il aurait rendu visite à « un copain de régiment en Vendée ». (M°)

Jeudi 21 décembre

- Jacques Méchinaud s'absente de nouveau dans la journée, un aller-retour pour la même raison. (M°)

Dimanche 24 décembre 

- "Mr F. se souvient : « Nous avons passé l'après midi ensemble. Nous nous sommes promenés en voiture avec nos enfants. » (CL 08/09/78)
- Maurice B. réveillonne en famille dans la maison voisine des Méchinaud. Il constate que la voiture du couple est absente. (M)
Monsieur F. indique ensuite « Puis nous avons réveillonné. L'ambiance était très détendue. » (CL 08/09/78) 

Lundi 25 décembre 

 - La voiture des Méchinaud étant toujours absente, Maurice B. est pris d'un doute, et comme il a une clé, entre dans la maison des Méchinaud. Constatant que le poêle est éteint, il décide de contacter le mari de la soeur de Pierrette, qu'il connait par un club de sport local. (M)
- Les deux hommes voient les cadeaux intacts pour les enfants sous le sapin, et un chéquier bien en évidence sur le frigo. (M)
- Le beau-frère de Pierrette signale l'absence de la famille à la Gendarmerie (M) qui ne donne pas suite, en raison du délai légal.
- "La famille (NdR Laquelle ?) elle, s’étonne en revanche de ne pas avoir de nouvelles car un repas est prévu le jour de Noël." (JB + autre source)

Mardi 26 décembre

- Des membres de la famille Méchinaud (11 enfants) ou de la famille de Pierrette, se rendent-ils à Boutiers pour prendre des nouvelles des Méchinaud ? L'histoire ne dit rien à ce sujet.

DÉBUT 1973

Jeudi 4 janvier

- "La famille l'a appris 10 jours après Noël, c'est-à-dire début janvier, par la presse, tout simplement", indique Jean-Paul Méchinaud. Il rappelle que son sentiment à l'époque était la disparition "(...) parce qu'il avait fait plusieurs voyages en Australie." (RTL)

Samedi 6 janvier

- Pierre E., le père de Pierrette, signale à la gendarmerie la disparition de sa fille, de son beau-fils et de ses deux petits-enfants.(SO 24/12/12)
- "Début janvier 1973, l’enquête débute." (FS) 

Au delà de la question "Où sont les Méchinaud", les interrogations sur cette mystérieuse disparition ne manquent pas. L'histoire ne dit pas, en effet, combien il est difficile de conduire dans le brouillard épais à une époque où l'éclairage des voitures était plutôt limité. L'installation de feux additionnels dits "de brouillard" était d'ailleurs un accessoire prisé (la Simca 1100 en était-elle équipée ?). Il n'est pas non plus dit que la couleur rouge grenat était au contraire une teinte parmi les rares permettant de distinguer un véhicule en de telles circonstances, et si la famille a été accompagnée par leurs hôtes jusqu'à la rue à leur départ (il s'agit généralement d'un usage), ni dans quelle direction sont partis les Méchinaud. 

Ils auraient effectué un parcours de 3800 mètres situé en partie en ville dans une nuit de fête durant laquelle d'autres voitures devaient probablement, lentement, circuler.

Dans ce brouillard, qui ne permet pas de distinguer "à plus de trois mètres", comment conduire, avec certitude, vers un point de non retour sans le risque, justement, de ne pas y arriver ? Et sans éveiller de protestation du conjoint ?

L'histoire est muette aussi, à propos des voyages en Australie qu'aurait effectué Jacques Méchinaud, et notamment des dates, pas plus qu'elle ne parle, comme pour du supposé argent en espèces, de l'existence ou non d'un ou de plusieurs passeports. On s'interroge aussi sur la nécessité d'effectuer un ou plusieurs déplacement sur une distance non négligeable, en Vendée, trois jours à peine avant la disparition. Pour obtenir une arme, une seconde voiture ? Et dans ce cas plus besoin de, si on peut dire, simplement précipiter sa voiture et les occupants dans un gouffre.

L'histoire ne dit pas non plus quand s'est décidé que les Méchinaud aillent passer le réveillon chez les F., alors que dinde et huitres attendent dans leur réfrigérateur. Après une promenade en voiture, le repas de Noël chez les F. n'était-il pas plutôt pour les enfants qui ne devaient pas faire attendre Monsieur F. "qui venait les chercher" comme l'indique à l'époque le journal télévisé ?

Sources :

(CL) La Charente Libre

(M) https://www.marianne.net/societe/police-et-justice/disparus-de-boutiers-50-ans-apres-la-justice-sur-les-traces-de-la-famille-mechinaud

(M°) D'autres sources indiquent "Il s'absente pour deux jours" "Il s'absente plusieurs jours"

(L)https://www.liberation.fr/histoires/2003/02/04/le-mystere-de-la-simca-1100-grenat_429794/

(JB) https://jeanberthelot.com/2017/06/01/disparus-de-boutiers-le-deuil-impossible/

(SO) Site du journal Sud-Ouest

(SO°) https://www.sudouest.fr/charente/angouleme/a-chaque-noel-on-y-pense-9759753.php

(FS)http://archive.francesoir.fr/actualite/faits-divers/recherche-d-une-famille-disparue%E2%80%A6-en-1972-159799.html

(RTL) https://www.rtl.fr/actu/debats-societe/les-disparus-de-boutiers-7789076944 [33:57]

Image en-tête : Pexels.com/skitterphoto

07 décembre 2022

L'énigme des disparus de Boutiers - Où sont les Méchinaud ?

Il y a 50 ans, le soir du 24 décembre 1972, près de Cognac en Charente, une famille complète a disparu. Le père, la mère, et les deux enfants. 

Les Méchinaud. Un cas de disparition qui est à ce jour la seule affaire en France où, après qu'une famille entière se soit évanouie, on ne retrouve aucun corps, ni leur voiture, ni rien. Aucune piste, aucune trace. Qu’est-il advenu des disparus de Boutiers ? 

Un "Cold Case" vieux de cinquante ans.

Toutes les personnes s'intéressant aux disparitions mystérieuses connaissent l'Affaire Méchinaud. C'est un classique. Depuis une cinquante d'années, nombres d'articles de presse, de documentaires ont été réalisés, et maintenant existent des podcasts ou des vidéos YouTube parlant de ce cas. Il s'agirait du dossier le plus ancien parmi les 37 affaires non élucidées reprises récemment par le pôle judiciaire national de Nanterre. Les éléments clés de cette affaire semblent être la dinde et les huitres dans le réfrigérateur, les cadeaux des enfants encore emballés sous le sapin et le carnet de chèques posé sur la table du salon. Que nous disent-ils ?

Jacques Méchinaud, 31 ans, Pierrette, sa femme, 29 ans, leurs deux fils, Éric 7 ans et Bruno 4 ans, auraient quitté le domicile d'un couple d'amis à Cognac le 25 décembre vers 1 heure du matin pour retourner à leur domicile situé à seulement quatre kilomètres de là, sur la commune de Boutiers-Saint-Trojan. Ils ne seraient jamais rentrés chez eux.

Selon tous les médias, Jacques, Pierrette, Eric et Bruno Méchinaud auraient été vu pour la dernière fois par leurs amis, au moment de partir de chez eux. La Fête avec quatre adultes et quatre enfants était-elle prévue d'avance ou au contraire, n'est-ce pas à la dernière minute que les Méchinaud ont été invités chez leurs amis pour réveillonner ? Pourquoi sinon les Méchinaud auraient-ils abandonné dans leur réfrigérateur la dinde et les huitres qui étaient à l'époque, et constituent encore de nos jours, des plats traditionnels du réveillon de Noël ?

"Un ami, qui venait les chercher (...), et les deux voitures, on pris le chemin de Cognac", précise la voix Off du journal télévisé de l'ORTF de l'époque pour indiquer que Monsieur F. est passé prendre les Méchinaud. Pourtant Jacques Méchinaud devait certainement connaître l'adresse de la famille F. Les deux maisons se trouvent à peu de distance l'une de l'autre. Bien qu'il fasse probablement nuit (si Jacques Méchinaud n'avait pas pu conduire de nuit il ne serait pas parti pour un retour nocturne) cela ne devait pas être la première fois qu'il se rendait chez son ami et collègue puisque dans le journal télévisé de l'ORTF Madame F. indique à propos de leur comportement ce soir-là "On les a trouvés comme d'habitude". D'autant que les F. habitent à deux pas de l'usine où ils travaillent tous deux.

Le drame se prépare la veille de Noël

Sur fond d'adultère, la vie des Méchinaud semble avoir basculé la veille de Noël. Le carnet de chèques familial, un objet souvent rangé précieusement dans les foyers français, se trouvait exposé sur la table du salon. Pourquoi ? S'agit-il d'un message de Jacques Méchinaud pour signifier que c'est lui qui subvenait aux besoins de la famille en multipliant les heures de travail alors que durant ce temps sa femme le trompait ?  On s'interroge à partir des affirmations ultérieures fournies par Monsieur F. Tous ces éléments présents dans la maison louée par les Méchinaud à Boutiers-Saint-Trojan, la dinde, les huitres, les cadeaux pour les enfants sous le sapin de Noël, tout cela aurait été mis en place le 24 décembre peu avant leur départ de chez eux. Etait-ce une mise en scène ?

La vie des Méchinaud semble basculer le 24 décembre. La famille a-t-elle quitté la maison en début d'après-midi ? Quelques années plus tard leur ami indiquait "Nous avons passé l'après midi ensemble. Nous nous sommes promenés en voiture avec nos enfants. Puis nous avons réveillonné. L'ambiance était très détendue."  Le couple a aussi deux petits garçons, on peut les apercevoir brièvement sur le canapé dans le document de l'ORTF.

Les Méchinaud ne sont probablement jamais revenus à leur domicile après en être partis. Ils ont disparu dans une nuit dont on a dit qu' "A l’extérieur, le temps est froid, un épais brouillard empêche toute visibilité au-delà de quelques mètres."

Dans les grandes énigmes : L'Affaire Méchinaud

Entre le suicide collectif et le départ de toute la famille pour l'Australie, les possibilités sont larges. On pourrait même imaginer le départ de Jacques Méchinaud, seul, avec ses enfants. Seul problème, personne n'ayant été inculpé dans cette affaire depuis 50 ans, et celle-ci étant toujours ouverte, les Disparus de Boutiers reste une simple affaire de disparition. En 2020, elle a été relancée. Diverses investigations ont de nouveau eu lieu. L’amant de Pierrette Méchinaud a été une nouvelle fois interrogé et un terrain, acheté par lui trente ans après la disparition, a été sondé. A propos de son terrain, l'homme ignore bien entendu ce que recherchent les enquêteurs "(...) Ils ont utilisé une sorte de tricycle équipé d’un appareil permettant de sonder le sol sur trente mètres de profondeur", indique-t-il. 

En Charente, on pense que les restes des Méchinaud peuvent se trouver au fond d'un "siphon de carrière", et chacun aimerait connaître la solution à l'énigme. La famille pourrait tout autant vivre aux antipodes avec de faux papiers sous un nouveau nom. Qu'est devenu le "pécule" que Jacques Méchinaud aurait amassé en réparant des voitures ? Et qui aurait contrôlé un couple ou un homme seul avec deux enfants la nuit de Noël ?

Image d'un détecteur pour illustration

Sources : https://www.mariefrance.fr/actualite/cold-case-quest-il-arrive-a-la-famille-mechinaud-disparue-mysterieusement-le-soir-de-noel-1972-659681.html#item=1 https://archive.wikiwix.com/cache/index2.php?url=https%3A%2F%2Fwww.charentelibre.fr%2F2020%2F07%2F08%2Fdisparus-de-boutiers-l-enquete-a-nouveau-relancee%2C3619355.php#federation=archive.wikiwix.com&tab=url http://archive.francesoir.fr/actualite/faits-divers/recherche-d-une-famille-disparue%E2%80%A6-en-1972-159799.html https://www.liberation.fr/histoires/2003/02/04/le-mystere-de-la-simca-1100-grenat_429794/ https://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_M%C3%A9chinaud https://philippe-dumas.pagesperso-orange.fr/actua2.htm [transcription de Un soir de réveillon à Boutiers : une famille disparaît (CHARENTE LIBRE du 08/09/1978)] Image : Pour illustration, image (de 2006) extraite d'une vidéo consacrée aux trois disparues de Springfield, Missouri.

12 avril 2022

Le Trio de Fort Worth est toujours porté disparu

En décembre 1974, trois jeunes filles, Rachel Trlica, Renée Wilson et Julie Ann Moseley, ont disparu d'un centre commercial la veille du réveillon de Noël. Une étrange affaire de disparition jusqu'à présent non résolue. 

Dans cette affaire, depuis plus de 47 ans, personne n'a jamais été arrêté, aucun nom de témoins n'a été révélé et le grand public ne dispose que de très peu d'informations officielles. On ne sait pas exactement à quelle heure les filles ont été vues pour la dernière fois et il n'est même pas facile de savoir précisément où la voiture retrouvée était garée sur le parking du centre commercial.

Ce que nous savons

Nous sommes le lundi 23 décembre 1974. À Fort Worth, près de Dallas, dans l'État du Texas. Dans quelques instants, il sera midi. L'action se déroule sur Gordon Avenue, devant la maison de la grand-mère de Renée Wilson. Renée a 14 ans et sa mère travaille pour une entreprise de nettoyage à sec. Ce matin-là, comme elle le fait habituellement, la mère dépose Renée chez sa grand-mère*. La jeune fille est joyeuse et excitée car elle a reçu tôt ce matin une bague de fiançailles de son petit ami, Terry, 15 ans, qui habite en face.

Ensuite, les deux jeunes gens attendent devant la maison. Ils attendent l'arrivée d'une amie de Renée, Rachel. Les deux jeunes filles ont rendez-vous pour aller faire du shopping dans le centre commercial voisin, le Seminary South. Elles se connaissent depuis longtemps car leurs parents avaient l'habitude d'aller camper ensemble quand ils en avaient l'occasion. Le 23 décembre, il est temps pour elles d'aller faire du shopping. Ce n'était pas possible auparavant pour Renée. À 14 ans, elle n'a pas de voiture, et puis elle doit aller chercher des vêtements que le magasin Army and Navy a mis de côté pour elle, deux paires de jeans. Pour Renée Wilson, il n'est pas question que le shopping dure trop longtemps. Le soir même, elle doit se rendre à une fête de Noël avec son petit ami Terry et elle veut avoir le temps de se préparer. Les filles ont donc décidé de rentrer chez elles à 16 heures.

Rachel Arnold arrive quelques minutes plus tard, au volant d'une Oldsmobile marron doré, une Cutlass quatre portes de 1972. C'est une grosse voiture américaine de l'époque avec un énorme coffre à l'arrière. La jeune conductrice, Rachel, a 17 ans et est mariée depuis 6 mois à Thomas (Tommy) Trlica, un homme de 21 ans déjà divorcé et père d'un fils de 2 ans. La vie était différente à l'époque et après avoir divorcé, Tommy s'est fiancé à Debra, la sœur aînée de Rachel. Debra a deux ans de plus que Rachel. Quelque temps plus tard, le couple se sépare, Tommy se rapproche de Rachel et ils se marient. Debra, de son côté, est tombée amoureuse d'un autre garçon, puis ils se sont séparés. Rachel a invité sa sœur à venir habiter avec elle, Tommy et le petit garçon de Tommy, Shawn.

À 17 ans, Rachel Trlica est étudiante au lycée Southwest de Fort Worth et, en même temps, elle cherche un emploi dans un magasin. Il est possible que cette recherche l'ait conduite auparavant vers les magasins du centre commercial Seminary South, qui n'est pas si loin de chez elle. Ce lundi 23 décembre au matin, avant de partir rejoindre Renée Wilson et de se rendre au centre commercial, Rachel a proposé à sa sœur de l'accompagner, mais Debra a préféré rester au lit. On ignore comment Rachel était habillée ce lundi 23 décembre 1974. On sait seulement que la jeune femme a les cheveux bruns, les yeux verts, une dent antérieure supérieure ébréchée et une petite cicatrice au menton. Elle porte une alliance. Elle mesure 1,68 m et pèse 49 kg.

De son côté, Renée a des cheveux roux ondulés, une peau claire et des yeux marron. Elle mesure 1,57 m et pèse 50 kg. Elle a 14 ans et était habillée d'un pantalon bleu violet qui lui serrait les hanches, d'un t-shirt jaune pâle Avon, avec les mots "Sweet Honesty" écrits en lettres vertes. Elle portait des chaussures Oxford rouges et blanches et une bague de fiançailles.

Vivant dans la maison en face de la grand-mère de Renée, la maison dans laquelle Renée se trouve la plupart du temps, Julie Ann Moseley a 9 ans, des cheveux sable, des yeux bleus. La petite fille mesure 1,30 m et pèse 39 kg. Elle a une petite cicatrice sous l'œil gauche et une autre au milieu du front. Les vêtements qu'elle portait le matin du 23 décembre sont un chemisier rouge, un pantalon en jean foncé et des chaussures de tennis rouges. La jeune fille est également la sœur de Terry, le fiancé de Renée. Sachant pour la bague de fiançailles de Renée et voyant arriver la voiture de Rachel, elle en profite pour traverser la rue et se joindre à la conversation.

En ce lundi 23 décembre 1974, en fin de matinée, devant la maison de la grand-mère de Renée à Fort Worth, sur Gordon Avenue, il y a aussi Janet, 11 ans, l'aînée des sœurs de Terry. Dans ce quartier, en pleine période de vacances, le moindre événement est immédiatement connu de tous. Avant de partir pour le centre commercial Seminary South, Rachel et Renee demandent à Janet si elle veut les accompagner mais la jeune fille décline l'invitation.

Julie Ann en profite pour demander si elle peut venir à la place de Janet. Les deux jeunes filles sont un peu prises de court à l'idée de surveiller une fillette de 9 ans qu'elles ne connaissent pas très bien, et l'idée ne les enchante guère. Elles tentent d'esquiver en répondant "Oh oui, mais seulement si ta mère accepte", certaines que la mère refusera.

Julie Ann n'a qu'à traverser la rue pour appeler sa mère. Elle rentre chez elle, et parvient à la joindre sur son lieu de travail. Après plusieurs refus, la mère ne connaissant pas mieux Rachel et Renée, sa mère lui dit "vous n'avez pas d'argent". Elle finit par se rendre à l'argument "je vais rester seule à la maison sans personne avec qui jouer". Une décision qu'elle regrettera pour le reste de sa vie. Les deux filles ont également invité Terry, mais le garçon, qui avait promis de passer l'après-midi avec un ami qui se faisait opérer d'une hernie le lendemain, veille de Noël, a également décliné l'invitation.

C'est donc en trio que Rachel, Renée et Julie Ann ont quitté avant midi ce quartier tranquille de Fort Worth.

C'est ici que se trouvait le magasin de surplus et de vêtements (Google)

Nous sommes à Fort Worth, au Texas. Il convient de préciser que la ville est immédiatement à l'ouest de l'agglomération de Dallas, que la maison du couple Trlica est un peu au sud-ouest du centre commercial, et que la maison de la grand-mère de Renée et celle des parents de Julie Ann ne sont pas très éloignées. En partant de cette rue et avant de se rendre au centre commercial Seminary South, le trio s'est d'abord dirigé vers le magasin Army and Navy pour récupérer des cadeaux qui avaient été mis de côté.

Les magasins de surplus se trouvent davantage en ville qu'en périphérie. Selon certaines sources, le magasin Army and Navy où les filles se sont rendues était situé au 601 West Berry. Renée aurait échangé le jean qu'elle portait pour ressortir vêtue de l'un des deux nouveaux. Selon l'histoire officielle, les filles se sont ensuite rendues au centre commercial et ont garé l'Oldsmobile au niveau supérieur, près du magasin Sears. À Fort Worth, les gens se souviennent de ce centre commercial à ciel ouvert dont la conception architecturale, l'aménagement paysager, les magasins bordés de larges allées avec des zones ombragées et des fontaines se sont combinés pour faire de ce lieu l'une des attractions populaires du grand Sud-Ouest américain.

À la fin des années 60 et au début des années 70, pour les habitants de Fort Worth, et surtout pour les résidents locaux, Seminary South était LE et surtout le seul centre commercial de la ville. Un lac avait été asséché pour sa construction et en fait, la plupart des parkings environnants étaient situés plus en hauteur.

En cette période de fêtes de fin d'année, Sears arborait le thème de Noël en lumières sur ses façades, mais les clients ne s'attardaient pas dehors à cause du froid, préférant se précipiter dans les magasins proposant des articles à bas prix.

Rachel connaît bien le centre commercial, elle habite à quelques rues de là et cherche un emploi dans un magasin. Renée et Julie Ann le connaissent probablement aussi. Des familles de Fort Worth viennent régulièrement à Seminary South et l'exposition de jouets de Noël chez Sears attire chaque année les enfants. Et puis ce magasin, tout comme son concurrent Murphys, possède un rayon de disques très apprécié des adolescents. C'est d'ailleurs au rayon disques de l'un de ces magasins que les trois jeunes filles auraient été vues pour la dernière fois, juste avant leur disparition, par un jeune employé prétendant être une connaissance de Rachel.

Disparues

Ce qui leur est arrivé par la suite est un mystère. Peu après que la disparition ait été rendue publique, plusieurs témoins ont signalé à la police de Fort Worth qu'ils avaient vu les trois filles à l'intérieur du centre commercial, mais la plupart des autres n'ont rien vu d'autre que la routine. Quelques personnes ont tout de même remarqué le t-shirt Sweet Honesty de Renee, sans donner plus de détails. Plus tard, beaucoup plus tard, ce seront finalement une vingtaine de témoins qui se souviendront, cet après-midi-là, avoir vu les trois filles disparues. Mais était-ce vraiment elles ?

Le lundi 23 décembre 1974, à 16 heures, pas de Rachel, pas de Renée, pas de Julie Ann. À 17 h, ni l'une ni l'autre. 18 heures sont arrivées, puis 19, 20 et 20h30. Peu à peu, la colère avait fait place à l'inquiétude.

De la fin de la journée et de la nuit qui a suivi, peu de souvenirs sont restés aux membres des familles. Ils ont trouvé la voiture garée et correctement verrouillée à l'est du parking de Seminary South, mais sans autre explication. Certains sont restés au centre commercial toute la nuit, surveillant l'Oldsmobile abandonnée avec un fusil de chasse et attendant le retour des filles. Est-ce Rachel ou quelqu'un d'autre qui a garé la voiture ? Un cadeau emballé pour Shawn, le beau-fils de Rachel, se trouvait à l'arrière de l'Oldsmobile, mais il était là depuis le départ de Gordon Road. Les jeans de Renée, une paire de jeans usés et une autre paire de jeans neufs, ont été retrouvés plus tard dans l'Oldsmobile. Selon la source, ils se trouvaient soit dans le coffre, soit dans un sac militaire sur le siège arrière de la voiture. Rien dans le contenu de la Cutlass n'indique que les filles soient retournées à la voiture, même pour ranger les achats qu'elles auraient faits au centre commercial.

"Je sais que je vais l'attraper" (la dispute)

Le lendemain matin, une lettre est arrivée au domicile de Rachel. Une lettre signée Rachel pour son mari Tommy. L'enveloppe est adressée à Thomas A. Trlica, sous forme administrative, et non au familier "Tommy" comme Rachel appelait toujours son mari. "Rachel" est griffonné dans le coin supérieur gauche de l'enveloppe, et le cachet de la poste sur un timbre de 10 cents est daté de ce matin-là, le mardi 24 décembre 1974.

De nombreuses interrogations concernant l'enveloppe et la feuille de papier manuscrite remontent à ce jour. La plupart des articles de journaux et des billets de blogs ont repris cette étrange lettre et on la retrouve reproduite partout sur le net (exemple ici). Rien ne prouve que cette "lettre" n'a pas été écrite pour une autre raison et même bien avant la disparition des filles. En tout cas, le sujet est discuté depuis août 2004 sur un forum bien connu.
Si elle est liée à la disparition, la question n'est pas tant de savoir qui a écrit la lettre que de savoir à quoi elle est destinée. Il était probable que cette note manuscrite soit une invraisemblance. Et puisque après une semaine les filles ne sont pas revenues, il était dès lors évident qu'il s'agissait d'un leurre. Mais dans quel but ? Pour adoucir l'événement pour les familles ? Qui sont les criminels qui s'occupent des proches des personnes disparues ? Les proches sont généralement considérés comme des suspects.
Cette lettre présumée de Rachel est particulièrement curieuse en raison de sa rapidité d'acheminement.

Bien que cette circonstance puisse exister, il est inhabituel qu'un ravisseur multiple écrive ou envoie aux familles des lettres se présentant comme venant des victimes. D'autre part, nous décelons la volonté de quelqu'un d'attribuer la décision de fuir à l'aînée. Parce qu'elle est la plus âgée ? Pas parce qu'elle conduit une voiture, dans ce cas la voiture est restée sur le parking. Le but était soit d'épargner effectivement les familles car le ou les ravisseurs avaient une raison de le faire, soit d'entretenir la confusion en fournissant une fausse piste aux enquêteurs. Ou les deux.

Après la disparition, la police a dit aux parents que les filles avaient fugué, ce qu'ils ont fermement nié. Ce n'est qu'au début de 1975 qu'un jeune homme prétendant être une connaissance de Rachel a finalement appelé le père de celle-ci pour lui dire qu'il avait vu les filles cet après-midi-là au rayon des disques d'un magasin du centre commercial. Selon ce jeune homme, Rachel et lui auraient parlé brièvement. Plus étrange encore, il a également affirmé qu'une autre personne semblait être avec les filles.
Frustrées par l'enquête de la police, les familles des filles disparues ont engagé un détective privé flamboyant au printemps 1975. Il organise des conférences de presse, oblige la police à le laisser examiner les dossiers et fait la une des journaux. L'homme est mort en 1979 de ce qu'on a dit être une overdose, sans aucun résultat sur l'affaire. Sa mort a été classée comme un suicide et tous ses dossiers, y compris ceux relatifs à ce Trio disparu, ont été détruits, comme il l'avait demandé. Les familles ont suivi toutes les pistes possibles, des centaines de routes secondaires ont été explorées par des bénévoles. La plupart des broussailles du Texas ont été ratissées, toujours sans résultat.

Vingt ans et bien plus tard

Rusty Arnold avait 11 ans lorsque sa sœur Rachel a quitté la maison en décembre 1974. Vingt ans plus tard, au milieu des années 1990, il a rencontré un nouveau détective privé en faisant une recherche aléatoire dans les pages jaunes. À sa grande surprise, le frère de Rachel a découvert que ce détective privé en savait déjà beaucoup sur l'affaire des personnes disparues et semblait vouloir résoudre le mystère. Jamais engagé par les familles, et bien qu'il ait annoncé à l'époque une récompense de 25 000 dollars provenant de ses fonds personnels, il a jusqu'à présent surtout recueilli des menaces l'invitant à rester à l'écart de l'affaire du trio disparu. Lorsqu'elle a été rouverte en janvier 2001, l'affaire a été confiée à un nouvel inspecteur de la criminelle dont l'opinion était que les filles avaient quitté le centre commercial avec quelqu'un en qui elles avaient confiance, et que plus d'une personne était impliquée dans l'histoire.

Au cours des dernières années, Rusty Arnold et une équipe de plongeurs professionnels ont fouillé à plusieurs reprises le lac Benbrook, situé à environ 12 km de l'endroit où sa sœur a été vue pour la dernière fois, dans l'espoir de trouver des preuves qui pourraient faire la lumière sur ce qui est arrivé aux trois filles disparues. Non seulement le lac est proche de l'endroit où se trouve le centre commercial, mais il est également proche du domicile d'un suspect. En utilisant un sonar, Arnold a localisé trois voitures au fond du lac Benbrook.

En 2018, une équipe de quatre plongeurs l'a aidé à récupérer les trois voitures situées au fond du lac. Le 22 septembre 2018, l'équipe de plongeurs a sorti la première voiture. Le 13 octobre, la deuxième voiture a été sortie de la boue, après deux jours d'efforts. Malheureusement, une équipe médico-légale a déterminé qu'aucune des voitures n'était liée au trio disparu. En septembre 2019, des plongeurs ont tenté de remonter la troisième voiture, mais la carcasse, après de nombreuses années sous l'eau, s'est avérée trop fragile pour être retirée du lac Benbrook. Il a été décidé de reporter son exploration, et une nouvelle tentative a été faite le 17 juillet 2020, malgré l'opacité de l'eau. La carcasse de la voiture a finalement été fouillée, mais rien n'a été trouvé.

Cette déception n'a pas entamé les espoirs de Rusty Arnold et des plongeurs. Ils espèrent explorer un autre lac voisin et trouver un indice dans une autre voiture qui pourrait être liée au trio disparu.

De multiples théories mais pas de corps

Les dizaines de théories sur cette affaire pourraient écrire une douzaine de romans sur les raisons de la disparition des filles. Et encore, elles tournent principalement autour de Rachel. Si on prenait Renée ou Julie Ann comme cible principale, on pourrait probablement multiplier les scénarios par deux. C'était un voyage planifié pour Rachel et Renée et elles ont pu en parler autour d'elles bien avant ce lundi 23 décembre. Rachel et Renée avaient un rendez-vous pour aller chercher des jeans mis de côté et Renée a pu en parler à l'école, avec des amis, avec la famille. On ne sait pas exactement pourquoi Rachel devait sortir, si ce n'est pour être le chauffeur de Renée. On ne sait pas ce que Rachel était censée faire au centre commercial.

Était-elle là pour acheter un disque de chansons de Noël pour son premier réveillon avec son mari et son beau-fils ? Une famille déjà composée. À moins que les filles n'aient été attirées par l'achat du dernier tube musical. Replaçons-nous en 1974. Les magasins de disques étaient des endroits où l'on pouvait acheter des disques, les écouter, ou même simplement regarder les pochettes dans les rayonnages. Quel est le lien entre les filles et les disques ? En ont-elles acheté un, en ont-elles écouté un ? L'une d'entre elles a-t-elle eu un rendez-vous à cet endroit ? Ou bien n'y sont-elles jamais allées ? 

Une partie du parking Est du Centre Commercial (Illustration Google Street View)

Renée et Julie Ann ont été vues pour la dernière fois sur Gordon Avenue le 23 à 12h00 (il a été dit midi pour Renée). La sœur de Rachel a signalé sa disparition par téléphone le 24 décembre 1974 à 1h30 du matin. Elle a alors indiqué qu'elle l'avait vue pour la dernière fois le 23 à 12h30 et a déclaré que la voiture, dont elle a indiqué la plaque d'immatriculation, avait été retrouvée garée sur le parking du centre commercial à 22h00. Il est possible qu'elle ait trouvé la voiture à cette heure-là, car les proches de Renée ont déclaré l'avoir trouvée sur le parking Est à 20h30. La voiture était-elle garée sur un terrain assez éloigné appelé le "terrain supérieur" du centre commercial ou était-elle garée sur la partie supérieure du parking de Sears ? En cette période de Noël, personne n'a remarqué qui avait garé la voiture à cet endroit.

Dans la deuxième partie de la série de podcasts Gone Cold, il est fait mention d'un témoin qui a vu les trois filles au domicile de Rachel vers 12h30. Il est entendu que ce témoin était la mère de Shawn qui est venue déposer (ou reprendre, selon une source contradictoire) le petit garçon pour Noël. Si cette information est vraie, elle corroborerait la déclaration de la sœur de Rachel selon laquelle elle a vu Rachel pour la dernière fois à 12h30. Cela soulève cependant la question de la proposition de Rachel rapportée par la sœur de Rachel d'aller faire les courses avec elle. Qui gardait l'enfant le matin du 23 décembre ? Où était-il l'après-midi ? Qui l'aurait gardé si la sœur était partie avec les filles ?

Sur un groupe de discussion, une femme dit qu'elle et une autre fille étaient censées retrouver Rachel et Renée au Murphy pour le déjeuner. Elle ajoute que le trio ne s'est jamais présenté, mais admet également qu'elle et son amie n'ont pas attendu très longtemps et sont allées faire des courses par elles-mêmes. La femme affirme même qu'elles n'ont jamais vu le trio ce jour-là au centre commercial. Si tout cela est vrai, certains pensent qu'elles ont probablement disparu du centre commercial peu après leur arrivée.

Les filles ont-elles disparu parce qu'elles présentaient un réel intérêt ou une menace potentielle ? Ont-elles vu quelque chose qu'elles n'auraient pas dû voir ? Ou était-ce parce que toutes les trois représentaient une "attraction" pour une personne ou un groupe ? Des questions qui demeurent après toutes ces années. Il y a peu d'informations et beaucoup d'opinions. Pas de restes, pas de preuves, pas d'indices, pas de suspect officiel. Pourtant, tous ceux qui ont étudié cette affaire de disparition ont leur propre théorie (parfois plusieurs), tout comme l'auteur ici présent.


*Terry Moseley a déclaré à NBCNews en déc, 2018, que Renee "avait passé la nuit chez sa grand-mère" - Sources : Ce texte est la traduction adaptée de The Fort Worth Trio still Missing suivi de Unsolved Fort Worth Missing Trio Case : Sorting Out. Une partie du texte est basée sur le podcast (maintenant obsolète) de l'auteur en français (novembre 2020-avril 2021) - En ce qui concerne le premier article en français (avril 2019) et le podcast en français, les sources de base sont très documentées. A ces sources il faut ajouter https://www.fwweekly.com/2020/12/16/portrait-of-a-true-crime-character/, http://www.websleuths.com. Mise à jour le 14/04/2022

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